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La Vie de Jésus-Christ - Contents
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    Chapitre 46 — Le Calvaire

    Ils emmenèrent Jésus en poussant des cris de triomphe; mais, leurs clameurs cessèrent un moment, lorsque, passant par un lieu retiré, ils virent au pied d'un arbre sec, le cadavre de Judas qui avait trahi Christ. C'était un spectacle horrible; son poids avait rompu la corde avec laquelle il s'était pendu à l'arbre; en tombant, son corps s'était affreusement déchiré, et dans ce moment, des chiens le dévoraient. On ordonna d'ensevelir aussitôt ces restes hideux, et la foule passa outre; mais on entendit moins de cris moqueurs, et bien des visages pâles révélaient les pensées pleines d'effroi qui agitaient leurs cœurs. Le châtiment semblait déjà tomber sur ceux qui étaient coupables du sang du Sauveur.VJC 484.1

    Dans ce moment, la nouvelle de la condamnation de Jésus se répandit dans tout Jérusalem, remplissant de terreur et de crainte des milliers de cœurs, mais apportant une joie malicieuse à beaucoup de ceux qui avaient été repris par les enseignements du Sauveur. Les sacrificateurs s'étaient liés par promesse de n'inquiéter aucun des disciples, si Jésus leur était livré; de sorte que toutes les classes du peuple accoururent sur les lieux de cette scène révoltante, et que Jérusalem fut presque vide d'habitants. Nicodème et Joseph d'Arimathée n'avaient point été convoqués à la réunion du Sanhédrin, et aussi leurs voix ne se prêtèrent-elles point à la condamnation de Jésus. Ils assistaient à sa crucifixion, mais ils étaient incapables de changer ou de modifier sa terrible sentence.VJC 484.2

    Les disciples et les croyants qui demeuraient aux environs, se joignirent à la foule qui suivait Jésus au Calvaire. La mère de Jésus y était aussi, soutenue par Jean, le disciple bien-aimé. Le cœur de Marie était frappé d'une douleur inexprimable; pourtant, elle espérait encore, avec les disciples, voir changer cette scène terrible, et voir Jésus manifester sa puissance et apparaître devant ses ennemis comme Fils de Dieu. Puis de nouveau, son cœur de mère défaillait au souvenir des paroles dans lesquelles il avait brièvement dépeint les choses qui devaient s'accomplir en ce jour.VJC 484.3

    Jésus avait à peine dépassé la porte de la maison de Pilate, qu'on apporta la croix qui avait été préparée pour Barabbas, et on la chargea sur ses épaules meurtries et sanglantes. On fit également porter des croix aux compagnons de Barabbas qui devaient être mis à mort en même temps que Jésus. Le Sauveur avait à peine porté sa croix un petit bout de chemin, que la perte du sang, la fatigue et ses souffrances excessives le firent tomber défaillant sur le sol. Spectatrice des souffrances qu'endurait son fils, le voyant succomber sous cette lourde croix, le cœur de Marie défaillait de douleur. Combien n'eût-elle pas désiré soutenir de sa main sa tête blessée, et essuyer ce front qu'elle avait autrefois pressé sur son sein! Mais, hélas! ce douloureux privilége lui était refusé.VJC 485.1

    Lorsque Christ se fut un peu remis, on replaça la croix sur ses épaules, et on le força d'avancer. Portant son lourd fardeau, il fit quelques pas en chancelant, puis tomba évanoui sur le sol. Le bruit se répandit d'abord qu'il était mort, mais il reprit enfin ses sens. Les sacrificateurs et les gouverneurs n'éprouvaient aucune pitié pour leur victime souffrante; mais ils virent qu'il lui était impossible de porter plus loin l'instrument de torture. Ils étaient embarrassés de trouver quelqu'un qui voulût s'abaisser à porter la croix jusqu'au lieu de l'exécution. Les Juifs ne pouvaient point le faire, parce qu'ils se fussent souillés et n'eussent point pu prendre part à la fête de Pâque qui était proche.VJC 485.2

    Pendant qu'ils considéraient ce qu'il y avait à faire, un homme nommé Simon, Cyrénéen, arriva d'une direction opposée, et rencontra la foule; à l'instigation des sacrificateurs, cet homme fut saisi et obligé de porter la croix de Christ. Les fils de Simon étaient disciples de Jésus, mais lui-même n'avait jamais eu de rapport avec lui. Cette circonstance fut une occasion profitable pour lui. La croix qu'il fut forcé de porter devint le moyen de sa conversion. Il fut rempli de sympathie pour Jésus; les événements du Calvaire, les paroles prononcées par Christ, tout cela lui fit reconnaître le Fils de Dieu. Simon ne cessa dès lors d'être reconnaissant envers Dieu pour l'événement singulier qui l'avait mis à même de se convaincre que Jésus était le Rédempteur du monde.VJC 485.3

    Au moment où l'on croyait que Jésus mourait sous le fardeau de la croix, bien des femmes, qui n'étaient point disciples de Christ, furent touchées de pitié à la vue de ses souffrances, et poussèrent des gémissements lamentables. Lorsque Jésus revint à lui, il les regarda avec une tendre compassion. Il savait qu'elles ne se lamentaient point parce qu'il était un prophète envoyé de Dieu, mais par un simple sentiment d'humanité. Il regarda ces femmes en pleurs, et leur dit: “Filles de Jérusalem, ne pleurez point sur moi, mais pleurez sur vous-mêmes et sur vos enfants”.1Luc 23:27-31.VJC 486.1

    Jésus ne dédaigna point leurs larmes, mais la sympathie qu'elles exprimaient réveillait en lui une sympathie plus profonde pour elles. Il oublia ses propres souffrances dans la contemplation du sort futur de Jérusalem. Il n'y avait que peu de temps que le peuple s'était écrié: “Que son sang soit sur nous et sur nos enfants!” Avec quel aveuglement n'avait-il pas évoqué le sort qui allait le frapper bientôt! Un grand nombre de ces femmes mêmes qui pleuraient sur Jésus devaient mourir avec leurs enfants au siége de Jérusalem.VJC 486.2

    Jésus ne parlait pas seulement de la destruction de Jérusalem, mais de la fin du monde. Il dit: “Alors ils se mettront à dire aux montagnes: Tombez sur nous; et aux coteaux: Couvrez-nous. Car si l'on fait ces choses au bois vert, que fera-t-on au bois sec?” L'innocent était représenté par l'arbre vert. Si, à cause des péchés du monde, Dieu fit tomber sa colère sur le Rédempteur, lorsqu'il souffrit la mort de la croix, de quel sort ne seront point frappés les impénitents et les incrédules qui ont méprisé les grâces de Dieu, acquises par la mort de son Fils? L'esprit de Jésus passait de la destruction de Jérusalem à un jugement plus général, lorsque tous les impénitents seraient condamnés à cause de leurs péchés, et lorsque le Fils de l'homme viendrait, non point accompagné d'une populace meurtrière, mais des grandes armées du Tout-Puissant.VJC 486.3

    Une grande foule suivit le Sauveur au Calvaire; beaucoup le raillaient et se moquaient de lui, mais quelques-uns pleuraient et le louaient. Ceux qu'il avait guéris de diverses infirmités, et ceux qu'il avait ressuscités des morts, déclaraient ses œuvres merveilleuses avec hardiesse, et demandaient ce que Jésus avait fait pour être traité comme un malfaiteur. Seulement quelques jours auparavant, lorsqu'il entrait triomphant à Jérusalem, ils l'avaient accompagné en poussant de joyeux hosanna, et en agitant des branches de palmier. Mais plusieurs de ceux qui avaient alors proclamé sa louange, entraînés par le courant de la multitude, poussaient en ce moment le cri de “crucifie-le! crucifie-le!”VJC 487.1

    Le jour où les disciples avaient vu Jésus entrer triomphalement dans Jérusalem, ils avaient conçu les plus grandes espérances. Ils s'étaient pressés autour de leur Maître, et se sentaient grandement honorés d'être ses disciples. En ce moment, dans son humiliation, ils le suivent à distance. Ils sont remplis d'une douleur inexprimable, et toutes leurs espérances sont déçues. Combien ces paroles de Jésus ne s'étaient-elles pas vérifiées: “Je vous serai cette nuit à tous une occasion de chute; car il est écrit: Je frapperai le berger, et les brebis du troupeau seront dispersées”.1Matthieu 26:31. Pourtant les disciples avaient encore un léger espoir que leur Maître manifesterait sa puissance au dernier moment, et échapperait à ses ennemis.VJC 487.2

    Arrivés au lieu de l'exécution, les condamnés furent liés à l'instrument de torture. Tandis que les deux brigands se débattaient entre les mains de ceux qui les étendaient sur la croix, Jésus ne faisait aucune résistance. Sa mère attendait avec une incertitude angoissante, espérant qu'il accomplirait un miracle pour se sauver. Celui qui avait rendu la vie aux morts ne permettrait certainement pas qu'on le crucifiât. Quelle torture cette femme ne dut-elle pas endurer en voyant l'abaissement et les souffrances de son fils, sans qu'elle pût l'assister dans sa détresse! Son cœur était rempli de douleur et de désappointement. Devait-elle renoncer à croire qu'il était réellement le Messie? Le Fils de Dieu permettrait-il qu'on le mît à mort aussi cruellement? Elle vit ses mains étendues sur la croix, ses mains divines qui n'avaient jamais dispensé que des bénédictions, et qui s étaient si souvent avancées pour guérir la souffrance. Puis on apporta le marteau et les clous destinés à les y fixer; et lorsque le fer pénétra dans la chair, les disciples, le cœur brisé, transportèrent loin de cette scène cruelle la mère de Jésus évanouie.VJC 487.3

    Jésus ne fit entendre ni plainte ni murmure; son visage demeura pâle et serein; mais de grosses gouttes de sueur inondaient son front. Aucune main compatissante n'était là pour essuyer son visage; aucune parole de sympathie ou de fidélité ne se fit entendre pour soutenir son cœur humain. Il était réellement seul pour fouler au pressoir; et de tout le peuple, personne n'était avec lui. Pendant que les soldats accomplissaient cette œuvre, et qu'il endurait les souffrances les plus cuisantes, Jésus priait pour ses ennemis: “Mon Père! pardonne-leur, car ils ne savent ce qu'ils font.” Sa pensée se reportait de ses propres souffrances au crime de ses persécuteurs et à la terrible mais juste rétribution qui serait leur partage. Il avait pitié d'eux dans leur ignorance et leur culpabilité. Il n'invoqua aucune malédiction sur les soldats qui le traitaient si brutalement, ni vengeance sur les sacrificateurs et les gouverneurs qui étaient la cause de toutes ses souffrances, et qui couvaient des yeux l'accomplissement de leurs desseins; il priait seulement pour qu'ils fussent pardonnés: “car ils ne savent ce qu'ils font.”VJC 488.1

    S'ils avaient su qu'ils soumettaient à cette affreuse torture celui qui était venu pour sauver de la ruine éternelle une race coupable, ils eussent été saisis d'horreur et de remords. Mais leur ignorance n'effaçait point leur culpabilité; car ils avaient le privilége de connaître et d'accepter Jésus comme leur Sauveur. Ils rejetèrent toute preuve, et péchèrent non seulement contre le ciel en crucifiant le Roi de gloire, mais contra les sentiments d'humanité les plus naturels, en torturant jusqu à la mort un homme innocent. Jésus acquérait ainsi le droit de devenir avocat de l'homme en présence de son Père. Christ, dans sa prière pour ses ennemis, embrasse le monde entier, c'est-à-dire tous les pécheurs qui vivraient jusqu'à la fin du temps.VJC 488.2

    Après que Jésus eut été cloué sur la croix, l'instrument de supplice fut soulevé et planté avec une grande violence dans la place qui avait été préparée pour cela, causant au Fils de Dieu les souffrances les plus atroces. Pilate écrivit alors une inscription en trois langues différentes, et la plaça sur la croix, au-dessus de la tête de Jésus. Elle était ainsi conçue: “Celuici est Jésus, le Roi des Juifs.” Cette inscription placée sur la croix d'une manière aussi apparente, irrita les Juifs. Dans la cour de Pilate, ils avaient crié: Crucifie-le! Nous n'avons point d'autre roi que César! Ils avaient déclaré que celui qui donnait le titre de roi à un autre que César était un traître. Mais ils avaient dépassé leur but en désavouant tout désir d'avoir un roi de leur propre nation. Pilate, dans son inscription, écrivit les sentiments qu'ils avaient exprimés. C'était une déclaration virtuelle, et chacun le comprenait ainsi, que les Juifs, reconnaissant leur soumission au pouvoir romain, considéraient que tout homme qui aspirait à être roi des Juifs, quelque innocent fut-il à d'autres égards, serait jugé par eux comme digne de mort. Il n'y avait point d'autre délit mentionné dans cette inscription; elle indiquait simplement que Jésus était le roi des Juifs.VJC 489.1

    Les Juifs voyant cela, demandèrent à Pilate de changer l'inscription. Les principaux sacrificateurs lui dirent: “N'écris pas: Le roi des Juifs, mais qu'il a dit: Je suis le roi des Juifs.” Mais Pilate, irrité contre lui-même à cause de la faiblesse qu'il avait eue, et méprisant les sacrificateurs jaloux et artificieux, répliqua froidement: “Ce que j'ai écrit, je l'ai écrit”.1Jean 19:19-22.VJC 489.2

    Alors on vit s'accomplir une scène terrible. Sacrificateurs, gouverneurs et scribes, oubliant la dignité de leurs offices sacrés, se joignirent à la populace pour adresser des moqueries et des railleries au Fils de Dieu mourant, lui disant: “Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même.” Et quelques-uns répétaient par dérision: “Il a sauvé les autres, et il ne peut se sauver lui-même. S'il est le roi d'Israël, qu'il descende maintenant de la croix, et nous croirons en lui. Il se confie en Dieu: que Dieu le délivre maintenant, s'il lui est agréable; car il a dit: Je suis le Fils de Dieu.” “Et ceux qui passaient par là lui disaient des outrages, hochant la tête, et disant: Hé! toi qui détruis le temple, et qui le rebâtis en trois jours, sauve-toi toi-même, et descends de la croix”.2Luc 23:37; Matthieu 27:42, 43; Marc 15:29, 30.VJC 490.1

    Ces hommes, qui professaient être les interprètes de la prophétie, répétaient eux-mêmes les paroles que l'inspiration avait prédit qu'ils diraient à cette occasion; pourtant, dans leur aveuglement, ils ne s'apercevaient point qu'ils accomplissaient les prophéties. Les dignitaires du temple, les soldats endurcis, le méprisable brigand sur la croix et les hommes vils et cruels qui se trouvaient parmi la multitude, tous s'accordaient pour se moquer de Christ.VJC 490.2

    Les brigands qui furent crucifiés avec Jésus souffraient de douleurs physiques semblables aux siennes; mais l'un d'eux n'en était que plus endurci et désespéré; et la souffrance lui inspirait un esprit de défi. Il se joignit aux moqueries des sacrificateurs, et dit à Jésus d'un ton railleur: “Si tu es le Christ, sauve-toi toi-même, et nous aussi.”3Luc 23:39-43. L'autre malfaiteur n'était point un criminel endurci; ses mœurs s'étaient corrompues dans la fréquentation d'une mauvaise société; mais ses crimes n'étaient point si grands que ne l'étaient ceux de beaucoup de personnes qui étaient au pied de la croix, injuriant le Sauveur.VJC 490.3

    Comme le reste des Juifs, il avait cru que le Messie devait venir bientôt. Il avait entendu Jésus et avait été convaincu par ses enseignements; mais sous l'influence des sacrificateurs et des gouverneurs, il s'était détourné de lui. Il avait cherché à faire taire sa conscience dans le tourbillon des plaisirs; des sociétés corrompues l'avaient fait descendre de plus en plus la pente du mal, jusqu'à ce qu'il fût arrêté pour crime et condamné à la mort de la croix. Durant cette journée de jugement, il avait été à côté de Jésus dans le prétoire, et sur le chemin du Calvaire. Il avait entendu Pilate déclarer que Christ était un homme juste; il avait remarqué son divin maintien, et avec quelle pitié il pardonnait à ses bourreaux. Il reconnut dans son cœur que Jésus était le Fils de Dieu.VJC 490.4

    Lorsqu'il entendit les paroles railleuses de son criminel compagnon, il le reprit et “lui dit: Ne crains-tu point Dieu, puisque tu es condamné au même supplice? Et pour nous, nous le sommes avec justice, car nous souffrons ce que nos crimes méritent; mais celui-ci n'a fait aucun mal.” Puis, comme son cœur recherchait Christ, la lumière divine remplit son esprit. Dans Jésus, meurtri, méprisé, élevé sur la croix, il vit son Rédempteur, sa seule espérance, et, s'adressant à lui dans une humble foi: “Seigneur! souviens-toi de moi quand tu seras entré dans ton règne. Et Jésus lui dit: Je te le dis aujourd'hui, tu seras avec moi en paradis.”VJC 491.1

    Le criminel sur la croix, nonobstant ses souffrances physiques, sentit dans son âme la paix, et la consolation d'être agréé de Dieu. Le Sauveur, élevé sur la croix, supportant la souffrance et la moquerie, rejeté des sacrificateurs et des anciens, est recherché par une âme coupable et mourante, avec une foi qui discerne le Rédempteur du monde dans celui qui est crucifié comme un malfaiteur. C'était dans ce but que le Fils de Dieu avait quitté les cieux: pour sauver des pécheurs perdus qui allaient périr. Tandis que les sacrificateurs et les gouverneurs, dans leur dédaigneuse propre justice, ne voulaient pas reconnaître son caractère divin, il se révèle au brigand repentant, comme l'ami et le Sauveur du pécheur. Il enseigne ainsi que le plus grand des pécheurs peut trouver le pardon et le salut par les mérites du sang de Christ.VJC 491.2

    L'Esprit de Dieu illumine l'intelligence de ce criminel, qui accepte Christ par la foi; l'une après l'autre, les preuves que Jésus est le Messie viennent se grouper devant ses yeux, jusqu'à ce qu'enfin, dans la souffrante victime, condamnée près de lui à un même supplice, il contemple le Fils de Dieu. Tandis que les principaux des Juifs le renient, et que ses disciples mêmes doutent de sa divinité, le pauvre brigand, aux portes de l'éternité, à la fin de sa carrière et de ses souffrances, le nomme son Seigneur! Beaucoup de gens étaient tout prêts à l'appeler Seigneur lorsqu'il accomplissait des miracles, et de même après qu'il fut ressuscité des morts; mais personne ne l'appela Seigneur lorsqu'il était suspendu, mourant, sur la croix, excepté le brigand repentant, sauvé à la onzième heure.VJC 492.1

    C'était une vraie conversion, dans des circonstances toutes spéciales, dans un but spécial et particulier. Elle témoignait devant tous ceux qui en étaient témoins, que Jésus n'était pas un imposteur, mais conservait son caractère de Messie, poursuivant sa mission jusqu'à la scène finale de sa vie terrestre. Dans tout son ministère, jamais parole n'avait été plus agréable à ses oreilles que cette expression de foi sortant de la bouche du brigand à fin de vie, au milieu des blasphèmes et des sarcasmes de la populace. Mais que personne ne néglige les occasions qui se présentent actuellement, et ne renvoie sa repentance, comptant, comme le brigand, se convertir à la onzième heure, et pouvoir se repentir sur son lit de mort; tout rayon de lumière négligé laisse le pécheur dans de plus grandes ténèbres qu'auparavant, jusqu'à ce que l'erreur s'empare de son esprit, et que son cas soit sans espérance. Pourtant, il est des exemples tels que celui du pauvre brigand, où des personnes sont éclairées au dernier moment, et où la lumière d'en haut est acceptée avec une foi intelligente. De tels pénitents trouvent faveur auprès de Christ.VJC 492.2

    Les anges considéraient avec étonnement l'amour infini de Jésus, qui, souffrant les angoisses mentales et corporelles les plus atroces, ne pensait qu'aux autres, et encourageait l'âme pénitente à croire. Tandis qu'il livrait sa vie à la mort, il témoignait à l'homme un amour plus fort que la mort. Christ, dans son humiliation, s'était adressé comme prophète aux filles de Jérusalem; comme sacrificateur et avocat, il avait intercédé le Père, le priant de pardonner les péchés de ceux qui le faisaient mourir. Comme un Sauveur rempli d'amour, il avait pardonné l'iniquité du brigand repentant qui se confiait en lui. Bien des personnes, qui furent témoins de cette scène du Calvaire, furent amenées plus tard par elle à la foi en Christ.VJC 492.3

    Le serpent élevé dans le désert, représentait le Fils de l'homme élevé sur la croix. Christ disait à Nicodème: “Comme Moïse éleva le serpent dans le désert, de même il faut que le Fils de l'homme soit élevé, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu'il ait la vie éternelle.”1Jean 3:14. Dans le désert, tous ceux qui regardèrent le serpent d'airain qui avait été élevé, vécurent, tandis que ceux qui refusèrent de le regarder moururent. Les deux brigands sur la croix représentent les deux grandes classes d'hommes. Tous ont senti le poison du péché, représenté par la piqûre du serpent brûlant, dans le désert. Ceux qui regardent à Jésus-Christ et croient en lui, comme le fit le brigand qui était cloué à la croix, vivront à toujours; mais ceux qui refusent de regarder à lui et de croire en lui, comme le brigand endurci refusa de regarder le Rédempteur crucifié et de croire en lui, mourront sans espérance.VJC 493.1

    Pendant ce temps, les ennemis de Jésus attendaient impatiemment sa mort. Ils s'imaginaient que cet événement ferait pour toujours taire les rumeurs de sa puissance divine et l'étonnement causé par ses miracles. Ils se flattaient de n'avoir plus à trembler à la pensée de son influence. Les soldats inhumains qui avaient cloué Jésus sur la croix, partagèrent ses vêtements, se disputant à l'égard de sa robe qui était un tissu sans couture. Ils décidèrent finalement de jeter le sort sur elle. La plume de l'inspiration avait exactement décrit cette scène des centaines d'années avant qu'elle eût lieu: “Des chiens m'ont environné, et une assemblée de gens malins m'a entouré; ils ont percé mes mains et mes pieds.” “Ils partagent entre eux mes vêtements, et jettent le sort sur ma robe.”1Psaumes 22:17, 19.VJC 493.2

    Jésus, les yeux arrêtés sur la multitude qui s'était assemblée pour être témoin de sa mort, vit au pied de la croix, Jean, soutenant Marie, sa mère. Elle était revenue auprès de cette terrible scène, incapable de demeurer plus longtemps loin de son fils. La dernière leçon de Jésus fut une leçon d'amour filial. Il regarda le visage de sa mère, contracté par la douleur, puis celui de Jean; s'adressant alors à sa mère: “Femme, voilà ton fils”; dit-il; et au disciple: “Voilà ta mère.”2Jean 19:26, 27. Jean comprit bien les paroles de Jésus, et le dépôt sacré qui lui avait été confié. Il éloigna immédiatement la mère de Christ de cette affreuse scène du Calvaire. Dès cette heure-là il prit soin d'elle en fils respectueux, la conduisant dans sa propre maison. O les compassions et l'amour du Sauveur! Au milieu de toutes ses souffrances physiques et de ses angoisses mentales, il prenait, plein de sollicitude, un tendre soin de celle qui lui avait donné le jour. Il ne pouvait lui laisser aucune fortune qui lui assurât un avenir facile; mais, il possédait tout le cœur de Jean, et il lui remit sa mère en legs sacré. Ce dépôt devait être pour Jean une grande bénédiction, un souvenir continuel de son Maître bien-aimé.VJC 494.1

    L'exemple parfait d'amour filial donné par Christ brille d'un éclat sans pareil à travers tous les âges. Pendant qu'il endurait les tortures les plus intenses, il n'oubliait point sa mère, et pourvoyait à son avenir. Les disciples de Christ devraient comprendre que le respect et les soins qu'ils doivent à leurs parents font partie de leur religion. Aucun prétexte de dévouement religieux ne peut excuser un fils ou une fille de remplir les obligations dues à un père ou à une mère.VJC 494.2

    La mission de la vie terrestre de Christ était alors presque entièrement accomplie. Sa langue était desséchée: “J'ai soif”, dit-il. On emplit une éponge de vinaigre et de fiel, et on lui en offrit à boire; mais quand il eut goûté de ce mélange, il le refusa. Le Seigneur de gloire, le Prince de la vie se mourait pour la rançon des pécheurs.VJC 495.1

    Ce n'était point la crainte de la mort qui causait les inexprimables angoisses de Jésus. Le croire serait le placer en dessous des martyrs pour le courage et le sang-froid; car un grand nombre de ceux qui sont morts pour leur foi, ont supporté la torture et la mort, se réjouissant d'être comptés dignes de mourir pour le nom de Christ. Jamais martyr ne souffrit comme Christ; mais ce n'étaient point les angoisses corporelles qui le remplissaient d'horreur et de désespoir; c'était le sentiment de la malignité du péché, et le fait que l'homme y était devenu tellement accoutumé, qu'il n'en comprenait point l'énormité; c'était de savoir, en outre, que le péché était si profondément enraciné dans le cœur humain, qu'il était difficile de l'en arracher.VJC 495.2

    Christ, comme substitut et caution de l'homme, fut chargé du poids de ses iniquités; il fut considéré comme transgresseur, afin qu'il pût le racheter de la malédiction de la loi. La culpabilité de tous les descendants d'Adam, depuis le commencement du monde, oppressait son cœur. La colère de Dieu et la terrible manifestation de son déplaisir à cause du péché, remplissaient son âme de consternation. A la pensée que son Père cachait sa face de lui, le Sauveur, dans cette heure d'angoisse suprême, avait le cœur percé d'une douleur que l'homme ne comprendra jamais entièrement. Chaque douleur endurée sur la croix par le Fils de Dieu, les gouttes de sang qui découlèrent de sa tête, de ses mains et de ses pieds, les convulsions qui torturèrent son corps, et les angoisses inexprimables qui remplirent son âme lorsque son Père cacha sa face de lui, toutes ces choses parlent à l'homme, et lui disent: C'est par amour pour toi que le Fils de Dieu consentit à supporter ces crimes odieux; c'est par amour pour toi, qu'il a dépouillé l'empire de la mort, et qu'il a ouvert les portes du paradis et de la vie éternelle. Celui qui calmait les flots irrités par sa Parole, qui marchait sur les vagues écumantes, qui faisait trembler les démons, dont la présence faisait fuir la maladie, qui rendait les morts à la vie, et ouvrait les yeux des aveugles, s'offre lui-même sur la croix comme dernier sacrifice en faveur de l'homme. Il s'est chargé de nos péchés, a subi le châtiment dont la justice frappe l'iniquité, et s'est fait péché lui-même pour l'homme.VJC 495.3

    L'angoisse du Fils de Dieu était inexprimable; elle dépassait tellement ses souffrances physiques, que c'est à peine s'il les ressentait. A ce spectacle effroyable, les anges du ciel, atterrés, se voilaient la face. La nature inanimée elle-même exprimait sa sympathie à son Auteur méprisé et mourant. Le soleil refusa d'éclairer cette scène terrible. Ses éclatants rayons qui illuminaient la terre vers le milieu du jour furent tout à coup obscurcis. D'épaisses ténèbres enveloppèrent la croix et tous les lieux environnants, comme d'un voile funèbre. Il n'y avait ni éclipse, ni autre cause naturelle qui expliquât ces ténèbres aussi denses que celles de minuit, lorsqu'on ne voit ni les étoiles ni la lune. Ces épaisses ténèbres étaient un emblême de l'angoisse et de l'horreur dont était frappée l'âme du Fils de Dieu. Il avait éprouvé cette même angoisse dans le jardin de Gethsémané, lorsqu'il avait sué des grumeaux de sang, et où il serait mort si un ange du ciel n'eût été envoyé pour le fortifier, afin qu'il pût fouler le chemin ensanglanté du Calvaire.VJC 496.1

    Les ténèbres durèrent trois heures entières. Aucun œil ne pouvait percer l'obscurité qui entourait la croix, et personne ne pouvait pénétrer l'horreur plus profonde encore qui enveloppait l'âme souffrante de Christ. Une terreur indicible s'empara de tous ceux qui étaient réunis autour de la croix. Le silence de la tombe semblait être descendu sur le Calvaire. Les malédictions et les injures expirèrent sur les lèvres des railleurs. Hommes, femmes et enfants tombèrent sur le sol frappés d'une abjecte terreur. D'éblouissants éclairs, nullement accompagnés de tonnerre, s'échappaient de temps en temps de la nue, et laissaient apercevoir la croix et le Rédempteur crucifié.VJC 496.2

    Les sacrificateurs, les gouverneurs, les scribes, les bourreaux et la populace, tous pensaient que le temps de leur rétribution était arrivé. Peu à peu, quelques-uns se mirent à chuchoter que Jésus allait descendre de la croix. D'autres essayèrent d'avancer à tâtons pour rentrer en ville, se frappant la poitrine et gémissant de terreur. A la neuvième heure, les ténèbres se levèrent de dessus le peuple, mais continuèrent à envelopper le Sauveur comme d'un manteau. Les éclairs irrités semblaient être dirigés contre la croix par une main invisible. Alors “Jésus s'écria à haute voix, disant: Eli! Eli! lamma sabachthani? C'est-à-dire: Mon Dieu! mon Dieu! Pourquoi m'as-tu abandonné?”1Matthieu 27:46. Comme l'obscurité enveloppait Christ, plusieurs voix s'écrièrent: La vengeance de Dieu est sur lui. Les traits de la colère de Dieu tombent sur lui parce qu'il prétend être le Fils de Dieu! Lorsque le Sauveur eut poussé ce cri de désespoir, plusieurs de ceux qui avaient cru en lui furent remplis de terreur; ils perdirent tout espoir; si Dieu avait abandonné Jésus, qu'allaient devenir ses disciples et la doctrine qu'ils avaient aimée.VJC 497.1

    Les ténèbres se dissipèrent alors de l'esprit de Christ, et revenant au sentiment de ses souffrances physiques, il dit: “J'ai soif”. Ses persécuteurs avaient ici une dernière occasion de lui exprimer leur sympathie et de le soulager; mais lorsque l'obscurité eut disparu, leur terreur diminua, et ils craignirent de nouveau que Jésus ne vînt à leur échapper: “Et aussitôt quelqu'un d'entre eux courut, et prit une éponge, et l'ayant remplie de vinaigre, il la mit au bout d'une canne, et lui en donna à boire. Et les autres disaient: Attendez, voyons si Elie viendra le délivrer.”VJC 497.2

    En cédant ainsi sa vie précieuse, Christ n'était point salué par des démonstrations de joie triomphante; tout était d'une tristesse accablante. Là se trouvait, suspendu à la croix, l'Agneau de Dieu sans tache. Sa chair était lacérée de coups et de blessures; les mains précieuses, qui avaient toujours été prêtes à soulager les opprimés et les souffrants, étaient étendues sur la croix, et fixées par des clous; les pieds de celui qui avait parcouru patiemment tant de chemin pour dispenser des bénédictions, et pour enseigner la doctrine du salut, étaient meurtris et cloués à la croix; sa tête royale était blessée par une couronne d'épines; ses lèvres pâles et tremblantes, qui avaient toujours été prêtes à répondre aux appels de l'humanité souffrante, laissaient échapper ces tristes paroles: “Mon Dieu! mon Dieu! pourquoi m'as-tu abandonné?”VJC 497.3

    Satan, armé de tentations atroces, bourrelait le cœur de Jésus. En cette heure de ténèbres, les regards du Sauveur ne pouvaient percer jusqu'au-delà des portes du tombeau. L'espérance ne faisait point briller à ses yeux le spectacle d'un conquérant sortant triomphant du sépulcre, et accueilli dans les bras d'un Père acceptant son sacrifice. Il était tenté de craindre que Dieu n'eût pour le péché une horreur telle, qu'il ne pouvait se réconcilier avec son Fils. Christ ressentait en ce moment la détresse qui saisira le pécheur lorsque la miséricorde ne plaidera plus pour la race coupable. C'est le sentiment d'avoir, comme substitut de l'homme chargé des péchés du monde, attiré sur lui le courroux du Père, qui rendit si amère la coupe que buvait le Fils de Dieu, et qui lui causa le brisement de cœur dont il mourut.VJC 498.1

    Le peuple attend, silencieux, la fin de cette scène terrible. Le soleil luit de nouveau; mais la croix est enveloppée de ténèbres. Les sacrificateurs et les gouverneurs regardent du côté de Jérusalem: l'obscur nuage s'était arrêté sur la ville et sur les plaines de la Judée; et les violents éclairs de la colère de Dieu se dirigent contre la ville infortunée et condamnée d'avance.VJC 498.2

    Au milieu de ces affreuses ténèbres, privé de l'assurance consolante de la présence de son Père, le Sauveur se reposait sur les preuves qu'il avait eues auparavant, que Dieu acceptait ses travaux, et qu'Il contemplait son œuvre avec satisfaction. Christ à l'agonie, au moment de quitter l'existence, n'a que la foi pour le soutenir; il se confie en Celui auquel il a toujours obéi avec délices. Il connait le caractère de son Père, — sa justice, sa miséricorde et son amour, — et, plein de soumission, il s'abandonne entre ses mains.VJC 498.3

    Tout à coup, l'obscurité s'éloigne de la croix, et, d'une voix claire comme le son d'une trompette, qui semble résonner à travers la création, Jésus crie: “Tout est accompli.” “Mon Père! je remets mon esprit entre tes mains.”1Jean 19:30; Luc 23:46. Une lumière enveloppe la croix, et le visage du Sauveur resplendit d'une gloire semblable à celle du soleil. Puis il pencha la tête sur sa poitrine, et il expira.VJC 499.1

    Les spectateurs réunis autour de la croix, paralysés, et osant à peine respirer, portèrent leurs regards sur le Sauveur. De nouveau, les ténèbres couvrirent la face de la terre, et on entendit un bruit sourd semblable au bruit du tonnerre, accompagné d'un violent tremblement de terre. Les spectateurs furent précipités les uns sur les autres, et il s'ensuivit la plus grande confusion et une profonde consternation. Des rochers se détachèrent des montagnes environnantes, et furent précipités à grand bruit des hauteurs dans la plaine. Les sépulcres furent ouverts, et des morts jetés hors de leurs tombes. Toute la création paraissait devoir s'écrouler. Les sacrificateurs, les gouverneurs et les soldats, remplis de terreur, tombaient par terre sans pouvoir dire une parole.VJC 499.2

    Mais les ténèbres se dissipèrent de nouveau du Calvaire, et demeurèrent suspendues comme un drap funéraire sur la ville de Jérusalem. Au moment où Christ mourut, plusieurs sacrificateurs officiaient dans le temple, devant le voile qui séparait le lieu saint du lieu très-saint. Tout à coup, ils sentent la terre trembler sous leurs pieds, et le voile du temple, riche et forte draperie qu'on renouvelait chaque année, fut déchiré du haut en bas par la même main précisément qui écrivit les paroles de condamnation sur les murailles du palais de Belsçatsar. Le lieu très saint, dans lequel des pieds humains n'entraient solennellement qu'une fois par an, fut ouvert aux yeux de tous. La présence de Dieu ne devait plus jamais recouvrir le propitiatoire terrestre. La lumière de sa gloire ne devait plus jamais réfléchir sur les pierres précieuses formant le pectoral du souverain sacrificateur, ni le nuage de sa désapprobation y faire ombre.VJC 499.3

    Lorsque Christ mourut sur la croix du Calvaire, une voie nouvelle et vivante fut ouverte aux Juifs et aux gentils. Dès lors, le Sauveur devait officier comme sacrificateur et avocat dans les cieux des cieux. Dès lors, le sang des bêtes offert pour le péché était sans valeur; car l'Agneau de Dieu était mort pour les péchés du monde. La nature, voilée par les ténèbres, exprimait sa sympathie pour Christ dans son heure d'agonie. Ces ténèbres montraient à l'humanité que le Soleil de Justice, la Lumière du monde, retirait ses rayons de la ville de Jérusalem, autrefois si favorisée. C'était un témoignage miraculeux, donné de Dieu, et qui devait confirmer la foi de toutes les générations futures.VJC 500.1

    Jésus ne donna point sa vie jusqu'à ce qu'il eût achevé l'œuvre qu'il était venu accomplir; et il s'écria, en rendant le dernier soupir: “Tout est accompli.” Les anges se réjouirent à l'ouïe de ces paroles; car l'auguste plan de la rédemption était triomphalement accompli. Il y avait de la joie dans le ciel; car les fils d'Adam pouvaient maintenant, par une vie d'obéissance, être élevés finalement jusqu'en la présence de Dieu. Satan était défait, et il savait que son royaume était perdu.VJC 500.2

    Lorsque le chrétien comprend parfaitement la grandeur du sacrifice immense fait par celui qui est la Majesté du ciel, alors le plan du salut est magnifié dans son esprit. Et lorsqu'il médite le plan du Calvaire, les émotions les plus profondes et les plus sacrées s'élèvent dans son cœur. La contemplation de l'amour incomparable du Sauveur devrait absorber l'esprit, toucher et attendrir le cœur, sanctifier et élever les affections, et transformer complétement le caractère. L'apôtre Paul dit: “Car je n'ai pas jugé que je dusse savoir autre chose parmi vous que Jésus-Christ, et Jésus-Christ crucifié.”11 Corinthiens 2:2. Nous pouvons regarder au Calvaire et dire avec l'apôtre: “A Dieu ne plaise que je me glorifie en autre chose qu'en la croix de notre Seigneur Jésus-Christ, par laquelle le monde est crucifié à mon égard, et moi je suis crucifié au monde”.2Galates 6:14.VJC 500.3

    L'espérance des disciples semblait périr avec la mort de Christ. Ils regardaient avec une angoisse indescriptible ses paupières fermées et sa tête penchée; ses cheveux souillés de sang, ses mains et ses pieds percés. Ils n'avaient cru qu'au dernier moment qu'il mourrait, et ils avaient peine à croire qu'il était réellement mort. La Majesté du ciel mourut, abandonnée des croyants, privée de tout acte ou parole de sympathie qui la soulageât. Il ne fut pas même permis aux anges, remplis de pitié, de servir leur chef bien-aimé.VJC 501.1

    Le soir approchait, et un silence qui n'était point de la terre enveloppait le Calvaire. La foule se dispersait, un grand nombre retournaient à Jérusalem avec un tout autre esprit que celui qu'ils avaient eu le matin. Beaucoup avaient assisté à la crucifixion par curiosité, et non dans des sentiments de haine envers Christ. Pourtant, ils avaient cru les rapports qu'avaient forgé les sacrificateurs, et le considéraient comme un malfaiteur. Lors de l'exécution, ils s'étaient imbus de l'esprit des principaux des Juifs, et dans un moment d'excitation désordonnée, ils s'étaient joints à la populace pour se moquer de Jésus et le railler.VJC 501.2

    Mais lorsque la terre se fut enveloppée de ténèbres, la raison reprit le dessus; ils se sentirent accusés par leur propre conscience, et se virent coupables d'un grand péché. Au milieu de cette affreuse obscurité on n'entendait ni plaisanteries, ni rires moqueurs; et lorsque la lumière revint éclairer la nature, ils se retirèrent solennellement dans leurs demeures. Ils furent convaincus que les accusations des sacrificateurs étaient fausses, que Jésus n'était point un imposteur. Quelques semaines plus tard, ils étaient du nombre des milliers qui se convertirent à Christ, lorsqu'au jour de la Pentecôte, Pierre prêcha et expliqua le grand mystère de la croix ainsi que d'autres mystères qui concernaient le Messie.VJC 501.3

    Les officiers romains se tenaient près de la croix, lorsque Jésus, avec une voix d'une puissance étonnante, s'était écrié: “Tout est accompli”; puis était mort au même instant avec ce cri de victoire sur les lèvres. Jamais auparavant ils n'avaient été témoins d'une telle mort sur la croix. C'était une chose inouïe qu'un homme mourût ainsi après six heures de crucifixion. Dans le supplice de la crucifixion, les tortures étaient longues; le supplicié s'affaiblissait peu à peu jusqu'au moment où il était difficile de déterminer si la vie était éteinte ou pas. Mais qu'un homme mourant possédât, immédiatement avant sa mort, une telle puissance et une telle clarté dans la voix, que Jésus n'en avait fait preuve, c'était un événement si étonnant que les officiers romains, habitués à de telles scènes, s'en étonnèrent fort; et le centenier qui commandait le détachement de soldats qui se trouvait là, s'écria aussitôt: “Véritablement cet homme était le Fils de Dieu.”1Matthieu 27:54. Ainsi, trois hommes différant grandement l'un de l'autre déclarèrent ouvertement leur foi en Christ, le jour même de sa mort: celui qui commandait la garde romaine, celui qui porta la croix de son Sauveur, et celui qui mourut sur la croix à son côté. Les spectateurs et les soldats qui gardaient la croix furent convaincus, pour autant que leur esprit était capable d'en saisir l'idée, que Jésus était le Rédempteur qu'Israël avait attendu si longtemps. Mais les ténèbres qui enveloppaient la terre n'auraient pu être plus épaisses que celles qui enveloppaient les esprits des sacrificateurs et des principaux. Les événements dont ils avaient été témoins ne les avaient pas changés, et leur haine pour Jésus n'avait point été diminuée par sa mort.VJC 502.1

    A sa naissance, les anges avaient connu Christ, et avaient conduit les mages vers la crèche où il était couché. La multitude céleste avait chanté ses louanges au dessus des plaines de Bethléhem. La mer avait plus tard reconnu sa voix, et avait obéi à son commandement. La maladie et la mort avaient reconnu son autorité, et à sa parole, avaient abandonné leur proie. Le soleil l'avait connu, et avait caché sa face éblouissante à la vue de son agonie. Les rochers l'avaient connu, et avaient été réduits en fragments à l'ouïe de son dernier cri. Quoique la nature inanimée elle-même reconnût Christ, et rendît témoignage qu'il était le Fils de Dieu, pourtant, les sacrificateurs et les gouverneurs ne connurent point le Sauveur; ils rejetèrent les preuves de sa divinité, et fermèrent leur cœur à ces vérités. Ils ne furent pas aussi sensibles que les rochers granitiques des montagnes.VJC 502.2

    Les Juifs ne voulaient point que les corps de ceux qui avaient été exécutés demeurassent cette nuit-là sur la croix. Ils redoutaient que l'attention du peuple se portât plus longtemps sur les événements qui venaient d'accompagner la mort de Jésus. Ils craignaient les résultats, dans l'esprit du peuple, de ce qui s'était passé en ce jour. Prétendant que la sainteté du Sabbat serait souillée si les corps des suppliciés demeuraient sur la croix durant ce saint jour, qui suivait celui de la crucifixion, les principaux des Juifs envoyèrent demander à Pilate la permission de hâter la mort des victimes, afin que leurs corps pussent être enlevés avant le coucher du soleil.VJC 503.1

    Pilate également ne tenait pas plus qu'eux à ce que le spectacle de Jésus sur la croix durât plus longtemps qu'il n'était nécessaire. Le consentement du gouverneur ayant été obtenu, on rompit les jambes des deux hommes qui avaient été crucifiés avec Jésus, afin de hâter leur mort; mais Jésus ayant déjà expiré, on ne lui rompit point les jambes. Les rudes soldats qui avaient été témoins des regards et des paroles de Jésus sur le chemin du Calvaire, et lorsqu'il se mourait sur la croix, avaient été adoucis par ce dont ils venaient d'être témoins, et ils furent retenus de le mutiler en lui cassant les jambes. Ainsi fut accomplie la prophétie qui déclare qu'aucun de ses os ne serait rompu; et la loi de la Pâque, requérant un sacrifice parfait et complet, fut également accomplie dans le sacrifice de l'Agneau de Dieu. “Ils n'en laisseront rien jusqu'au matin, et ils n'en rompront point les os; ils la feront selon toute l'ordonnance de la pâque.”1Nombres 9:12.VJC 503.2

    A la suggestion des sacrificateurs qui désiraient s'assurer de la mort de Jésus, un soldat transperça le côté du Sauveur, lui faisant une blessure qui l'eût fait mourir instantanément s'il n'eût eu déjà expiré. De la large blessure faite par la lance, deux flots distincts découlèrent: l'un de sang, et l'autre d'eau. Ce fait remarquable fut noté par tous ceux qui en furent témoins, et Jean raconte distinctement ce fait en disant: “Un des soldats lui perça le côté avec une lance, et aussitôt il en sortit du sang et de l'eau. Et celui qui l'a vu, en a rendu témoignage (et son témoignage est véritable, et il sait qu'il dit vrai), afin que vous le croyiez. Or, cela arriva ainsi, afin que cette parole de l'Ecriture fût accomplie: Aucun de ses os ne sera rompu. Et ailleurs l'Ecriture dit encore: Ils verront celui qu'ils ont percé.”2Jean 19:34-37.VJC 504.1

    Après la résurrection, les sacrificateurs et les gouverneurs firent circuler le bruit que Jésus n'était pas mort sur la croix, qu'il s'était simplement évanoui et avait ensuite repris ses sens. Un autre rapport mensonger affirmait qu'on n'avait point mis dans la tombe un corps réel de chair et d'os, mais l'image d'un corps. Mais le témoignage de Jean concernant le côté percé du Sauveur et le sang et l'eau qui découlèrent de la blessure réfutent ces faussetés ébruitées par des Juifs sans scrupule.VJC 504.2

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